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 Solution technique - Janvier-Février 2016

Choisir sa caméra de thermographie infrarouge


Disponibles à partir de 1 000 €, les caméras de thermographie infrarouge sont aujourd’hui accessibles à l’ensemble des professionnels du bâtiment. Elles permettent d’effectuer une multitude de tâches : repérage de points chauds, ponts thermiques et anomalies en tous genres. Encore faut-il choisir la caméra adaptée à ses besoins...

em81 ST 1Pas de précipitation ! Le premier écueil à éviter consiste à acquérir une caméra thermique sur un coup de tête et qui, de fait, ne correspond pas totalement aux attentes que l’on en a. Avant toute chose, le professionnel doit lui-même faire la liste exhaustive de ses besoins. Pour cela, il faut imaginer l’usage principal de la caméra thermique, mais aussi les usages annexes. Par exemple, acquérir une caméra thermique pour vérifier la présence de points chauds sur des tableaux électriques ne doit pas empêcher d’utiliser l’outil pour déceler des ponts thermiques, des infiltrations d’air ou d’autres phénomènes permettant au professionnel d’exercer pleinement son métier.

Deux paramètres déterminants
Parmi les paramètres les plus déterminants à prendre en compte, les valeurs NETD et Ifov, qui vont fortement influer sur le prix de l’équipement et déterminer les possibilités d’usage.
– Le NETD (Noise Equivalent Température Différence) ou résolution thermique relève de la sensibilité thermique de la caméra. En d’autres termes, c’est la plus petite différence de température détectable. Elle s’exprime en millikelvins (mK) ou en degré Celsius (°C). Plus le NETD est faible, meilleure est la caméra pour détecter les contrastes thermiques.
À l’image des appareils photos, ces paramètres évoluent d’année en année avec du matériel toujours plus performant dans une même gamme de prix. Il n’y a pas si longtemps, les NETD observés avoisinaient 0,1 °C pour du matériel de moyenne gamme. Aujourd’hui, des caméras arrivent sur le marché avec un NETD inférieur à 0,045 °C.
– L’Ifov (Instantaneous Field Of View) est un paramètre de résolution spatiale exprimé en milliradian (mrad). Il s’agit d’une mesure d’angle d’ouverture qui permet de déterminer l’aire couverte par un pixel du capteur lorsque l’opérateur observe une surface à une distance donnée. Plus l’Ifov est petit, plus la surface correspondant à un pixel est faible. De fait, la caméra fournit des données plus précises.

 


Images « propriétaires »
Peut-être est-ce là le témoin d’un manque de maturité du marché : il n’existe pas encore de format standard d’image radiométrique. Rappelons qu’une image radiométrique permet d’obtenir avec précision la valeur de température de chaque pixel de la matrice et de faire varier l’alerte ou de mettre en évidence certains points caractéristiques.
Actuellement, seul un logiciel fourni par le fabricant (gratuitement avec la caméra ou vendus, pour les plus élaborés d’entre eux) permet d’analyser les images radiométriques prises avec une caméra de la même marque. Certes, il est toujours possible de convertir les fichiers en images de format JPEG, mais l’image est dégradée. Il n’est plus possible de déterminer avec autant de précision les niveaux et différences de température. Il faut le savoir.


 

La résolution spatiale découle de la taille du capteur et du choix de l’optique.

Capteur : le rayonnement infrarouge traversant l’optique a un impact sur la matrice, composée de pixels. Les caméras d’entrée de gamme disposent d’une matrice de 47 x 47 à 120 x 160 pixels. Pour les électriciens, il est conseillé un minimum de 120 x 160 pixels.

Optique : elle est composée de lentilles traitées spécialement pour le spectre infrarouge. C’est ce qui explique en partie le coût d’une caméra. Principale caractéristique : la distance focale, par exemple 20° x 15°. Le capteur étant rectangulaire, le premier chiffre concerne l’ouverture horizontale et le second l’ouverture verticale. Viser avec du recul un composant électrique dans une armoire ou la totalité de la façade d’un bâtiment sans prendre de recul nécessite évidemment une distance focale adaptée. Mais il faut se rappeler qu’un objectif grand angle dégrade la résolution de la caméra. Le choix est-il figé à l’achat ? Oui, pour certaines caméras dotées d’un objectif fixe « passe-partout » (20°). Mais pouvoir changer d’objectif est un atout supplémentaire si l’opérateur souhaite élargir son champ d’activités. Pour cela, des compléments optiques peuvent, sur certaines caméras, se fixer par-dessus l’optique d’origine. Enfin, il existe des appareils à objectifs interchangeables. Par ailleurs, le choix d’une mise au point manuelle de la netteté permet de gagner en précision.
Le nombre de pixels permet de calculer la résolution spatiale de la caméra, c’est-à-dire la dimension la plus petite, vue par un pixel. Par exemple, une caméra dotée d’une résolution spatiale de 2,2 mrad permettra de distinguer un détail de 2,2 mm de côté à 1 m de distance. Pour la même résolution, mais à 50 cm de distance, le détail visible sera de 1,1 mm. Ainsi, plus le détail visé est petit, plus la résolution spatiale devra être base.
Au-delà de ces considérations théoriques, dans la pratique, il est habituellement reconnu par les fabricants qu’une mesure est correcte pour un objet faisant la taille de trois Ifov. Par exemple, un Ifov de 1 mrad permettra de mesurer assurément la température d’un objet de 3 mm (à 1 mètre). Ce coefficient évite tout chevauchement partiel entre le pixel et la surface à mesurer, ce qui donnerait une moyenne de température (de l’objet et de son environnement) non représentative de la réelle température de surface de l’objet.

Plage de température
em81 ST 2Une caméra est conçue pour une utilisation sur une plage de température définie. Pour les applications classiques dans le bâtiment, une plage de - 20 °C à + 100 °C, voire + 250 °C suffit largement. D’ailleurs, du point de vue électrique, une température de 100 °C ou même 80 °C ne peut être que suspicieuse.

Fréquence
La fréquence de rafraîchissement de la trame indique la fréquence de renouvellement de l’image vue par la caméra, à l’écran. Les caméras sur le marché comprennent des fréquences de 9,33 Hz ou 50 Hz. Malgré une influence sur la netteté et le bruit, pour une prise de vue statique, il n’y a pas véritablement d’incidence de ce paramètre. Certaines caméras sont limitées à 9 Hz, notamment pour des raisons administratives d’exportation de matériel hors des États-Unis…

Émissivité
Ce paramètre, dont la valeur évolue entre 0 et 1, est propre à la surface de la cible visée. Les tables d’émissivité des principaux matériaux sont bien connues. De ce paramètre dépend la précision des mesures effectuées. Pour les besoins d’une intervention immédiate et ponctuelle, le réglage de l’émissivité sur l’appareil semble évident (lorsque cela est possible). En revanche, pour une campagne de mesure, la correction pourra être appliquée a posteriori avec l’outil logiciel.

Mélange entre image thermique et image réelle
Nombreuses sont les caméras qui, aujourd’hui, permettent de prendre une photographie à la fois dans le spectre IR et dans le spectre visible, via un appareil photo greffé sur la caméra. De quoi mieux comprendre le thermogramme et faciliter la mise en forme du rapport.

Toujours plus d’informations
Les fonctionnalités aujourd’hui greffées sur les caméras facilitent la lecture et le dépouillement : qu’il s’agisse de la prise de vue de l’image réelle simultanément, avec incrustation de thermogramme, de l’enregistrement de commentaires audio (micro intégré sur la caméra ou oreillette Bluetooth)… Apparaissent également des appareils de mesure de paramètres électriques d’une même marque capables, par liaison radio, de rapatrier vers la caméra les mesures effectuées et de les incorporer à l’image radiométrique.

 

Michel Laurent

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