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 Dossier - Mars 2011

 Câbles de données : cuivre et fibre optique sur un marché en devenir


Régis Paumier, délégué général du SYCABELEdito

"Les défis des câbles en 2011"

Pour le SYCABEL, l’actualité 2011 dans le domaine des « courants faibles » est fournie et diversifiée, preuve du dynamisme et de la place croissante prise par ces réseaux tant dans les bâtiments tertiaires que résidentiels.
Pour ces derniers, il s’agit d’accompagner le déploiement du Très Haut Débit afin de diffuser dans l’habitat les nouveaux services offerts en garantissant le niveau de performance qu’ils requièrent. Ces systèmes de câblage doivent en outre permettre l’interopérabilité de plus en plus indispensable entre les équipements de la maison.
Pour les systèmes de câblage professionnels, les préoccupations portent toujours sur l’accroissement des performances et l’adaptation des solutions au plus près des besoins. Ainsi, des câbles spécifiques vont être préconisés pour répondre aux contraintes des « Data Centers » (centres de traitement de données).
Ces sujets mobilisent évidemment les experts chargés de définir les normes et les recommandations garantissant la conformité et le fonctionnement approprié des installations.
La sécurité électrique globale reste aussi au cœur des travaux avec, notamment, l’arrivée prochaine du règlement européen produits de construction (RPC) qui se substitue à la Directive. La profession s’est ainsi engagée à offrir au marché une gamme de « Câbles de Protection au Feu » (CPF) qui réponde aux besoins des différents types de construction, notamment aux immeubles de grande hauteur et à ceux recevant du public.
Ces efforts se heurtent malheureusement à quelques difficultés majeures qui méritent une attention de toute la filière.
Citons tout d’abord la multiplicité de produits importés non conformes aux normes européennes, voire dangereux, qui créent confusion et doute au détriment de tous les acteurs. Ils détruisent ainsi, en partie, la confiance que les installateurs et leurs clients sont en droit d’attendre de leurs investissements.
Soulignons ensuite l’important problème économique dû à la hausse des matières premières et parfois à la difficulté d’en approvisionner. C’est non seulement le cas du cuivre dont le cours atteint des records historiques, mais aussi celui des autres matériaux dont les prix subissent l’effet d’une demande supérieure à l’offre. Il paraît difficile que tous les industriels puissent subir durablement de tels effets qu’ils sont jusqu’à présent les seuls à supporter.

 

Régis Paumier, délégué général du SYCABEL,
Syndicat professionnel regroupant les fabricants de fils et câbles électriques et de communication.

 


Câbles de données : cuivre et fibre optique sur un marché en devenir


Sommes-nous actuellement dans une période charnière ? Le câblage cuivre résidentiel haute performance reste peu développé, tandis que la fibre ne devrait pas tarder pas à frapper à la porte de chaque appartement. Coté tertiaire, à l’heure de la convergence des réseaux, nous vivons seulement la transition vers la catégorie 6a. Et si les besoins de haut débit ne sont pas encore réels, ils évoluent cependant avec les habitudes de consommation et l’évolution des matériels actifs.

 

NEXANSAujourd’hui, le câblage structuré sur paire torsadées et devenu un standard en matière de transmission de données, aussi bien dans l’habitat que dans le tertiaire, voire dans l’industrie. Une technologie où règne en maître l’Internet Protocole (IP). En complément, la fibre optique se déploie, à la fois dans le bâtiment et en amont de celui-ci afin d’apporter aux clients des débits toujours plus importants. À ce titre, l’Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques et des postes.) vient de définir les règles de partage du territoire entre opérateurs de réseaux.
Bien que la performance d’un réseau soit liée à son approche système (en prenant notamment en considération la connectique), ce dossier reste focalisé sur les câbles.


Performance :  l’affaire des cordons
Il y a un peu plus d’une dizaine d’années, l’achat des cordons de liaison entre l’ordinateur et la prise RJ45 murale étaient souvent gérés par les responsables informatiques, bien au fait de l’importance du dernier maillon de la chaîne de transmission de données, en termes de débit et de performance. Aujourd’hui, cet équipement de câblage est plutôt géré comme une fourniture générale, tel un consommable, par d’autres services de l’entreprise pour qui la performance de transmission n’évoque pas grand chose... D’où le risque de voir diminuer la performance du câblage, uniquement par négligence sur les derniers mètres !
« Pour éviter cela, il est important d’acquérir les cordons auprès du fabricant du système de câblage », souligne Jean-Luc Hennes, directeur commercial de l’activité câbles de données cuivre et optique chez Nexans.


 

Tertiaire : au-delà de la catégorie 6a
« Le secteur du grand tertiaire et du bâtiment intelligent pourvu d’une architecture de réseau IP, tend à s’équiper de câbles Cat. 6a, 7 ou 7a à 1 000 MHz, avec des objectifs de performance élevés, souligne Jean-Luc Hennes chez Nexans. Concrètement, nous vendons actuellement environ 30 à 40 % de câbles Cat. 5, 50 % de câbles Cat. 6, 6a, 7 et 10 % de câbles Cat. 7a. Cette dernière catégorie est demandée depuis environ 2 ans pour l’équipement des grands projets.»
« Nous observons actuellement un basculement des ventes de la Cat. 6 vers l’offre Cat. 6a, avec une très forte compétition sur ce marché. La différence de coût entre les deux familles de câble est d’ailleurs relativement faible. Les câbles S/STP Cat. 7 intégrent aujourd’hui une tresse permettant de gérer les perturbations électromagnétiques au niveau des conducteurs. Là, réside leur principal intérêt sur le marché actuellement, car arrivent les câbles Cat. 7a S/FTP. »
Depuis 3 ans, Polycâbles (Groupe Omerin) propose des câbles de données Cat. 5 à aujourd’hui Cat. 7a. Ses ventes actuelles reposent surtout sur la Cat. 6, avec cependant une demande en Cat. 5 pour les signaux numériques des caméras sur IP. Et la Cat. 7 ? « La demande commence à poindre, mais avec un certain retard sur le marché français », remarque Sébastien Gauniche, directeur méthodes et R&D Polycâble (groupe Omerin).

Câbles de données et volunes de vente

 

Résidentiel : des besoins en perspective
« Dans le secteur du résidentiel et du petit tertiaire les acteurs utilisent encore des câbles de données équivalents à la Cat. 5e et Cat. 6, notamment par habitude sur un marché que l’on peut qualifier de généraliste », explique Jean-Luc Hennes, directeur commercial de l’activité câbles de données cuivre et optique chez Nexans. « Dans le secteur résidentiel, vont émerger dans les années à venir des problématiques de travail à domicile, de maintien à domicile et de télémédecine, ajoute Jean-Luc Hennes. Dans ce contexte, et pour répondre à de tels besoins, l’objectif est de pouvoir délivrer 100 Mbits au poste de travail. Par ailleurs, le développement des offres “triple play” comprenant téléphonie, Internet et télévision, sans oublier la téléphonie mobile au domicile, pousseront encore plus au déploiement du câblage haut débit.
En réponse à la demande du marché, nous proposons des câbles Grade 1 série 298 et série 299, les plus vendus actuellement. Les câbles Grade 3 ou Grade 3S, également à notre catalogue, restent des produits de prescription, notamment installés dans les maisons haut de gamme. »
Pour Sébastien Gauniche, directeur méthodes et R&D Polycâble (groupe Omerin), le Grade 2 n’est quasiment pas utilisé : « Ce câble est très peu présent sur le marché et ne donne pas entière satisfaction pour passer un signal TV. On observe cependant une mutation du marché de l’ancien câble PPT 278 2 ou 4 paires au câble PPT 298 relatif au Grade 1. L’idéal reste l’installation d’un câble Grade 3 voire Grade 3S qui à lui seul assure l’ensemble des service, dont la TV satellite pour ce dernier. »

CAE

 

Une demande encore très basique
Master distributeur dans le secteur des câbles de puissance et de transmission de données, Câblerie Daumesnil répond aux besoins des distributeurs de la filière électrique en mettant en avant ses capacités de stockage, ses services et la flexibilité de l’offre. « Nous sommes en permanence à l’écoute des besoins des grossistes », souligne Adrien Juif directeur commercial France. À ce titre, Câblerie Daumesnil observe actuellement une stagnation des volumes de câbles de données Cat. 5e et un développement de l’offre Cat. 6. Et pour la Cat. 6a ? « Nous n’en proposons pas encore à nos clients, car leur demande reste encore beaucoup trop faible. »
En matière de câbles de données pour les applications résidentielles et petit tertiaire, Câblerie Daumesnil commercialise environ 95 % de câbles Grade 1 (type PTT 298) : « Là encore, les demandes du marché restent centrées sur ce type de câble. Il faut comprendre que nous n’imposons aucune référence, mais restons simplement à l’écoute du marché », conclut Adrien Juif.
Chez Adka Câbles, les câbles Grade 3 occupe une portion croissante des ventes. « Cependant, nous vendons encore beaucoup de câble coaxial 17VATC. Autant que le câble PTT 298, souligne Béatrice Peironny, gérante. Mais ce dernier s’avère de moins en moins adapté aux besoins. Pour les applications tertiaires, notre plus grosse part de ventes repose sur le câble Cat. 6 à 250 MHz. Au-delà, il s’agit surtout de réponses à des demandes faisant l’objet d’un cahier des charges très précis et exigeant. Au-delà du choix des produits, nous avons encore besoin de communiquer sur les fondamentaux des câbles. Par exemple, cet hiver, certains metteurs en œuvre ont constaté à leurs dépends qu’un rouleau de câble laissé toute une nuit dans un véhicule à -15°C, ne se déroule pas à cette température sans dommage... »

 

Convergence : nous y sommes !
« La tendance est effectivement à la convergence des applications sur un même réseau, ajoute Olivier Parizot, directeur marketing network chez CAE Groupe. Cela grâce à d’importantes évolutions réalisées au niveau des équipements matériels et des logiciels. À présent, les infrastructures de câblage structurées permettent, sur un même type de câble, de transférer les données de communication, de sécurité, vidéosurveillance, contrôle d’accès, alarme incendie, sans oublier les différents capteurs et actionneurs du bâtiment. J’ajouterai que les paires torsadées ne véhiculent pas uniquement le protocole IP : elles peuvent servir de support par exemple aux signaux analogiques des caméras de vidéosurveillance. »
L’audio n’échappe pas non plus à la convergence, puisqu’il est aujourd’hui possible de transmettre un signal audio, analogique ou numérique, sur paires torsadées et sur de très grandes distances, simplement avec l’utilisation d’un convertisseur d’impédance. Cette interface est utile car les appareils source du signal audio sont rarement dotés d’une sortie directe sur connecteur RJ45. Mais la télévision sur IP est certainement la plus belle illustration de la convergence IP. Car les besoins dans le résidentiel, mais aussi dans le secteur tertiaire sont immenses. Les offres et services associés commencent à peine à se déployer. Dans ce contexte, il est impératif de prévoir une infrastructure en Cat. 6a blindée face à l’inéluctable augmentation des débits en perspective.
Ce mouvement de convergence fait globalement l’objet de travaux normatifs, en cours au sein du Cenelec, dans la perspective de la future EN 50-173-6.


Choix des câbles, de nouvelles habitudes
« Du fait de nouvelles habitudes d’utilisation des câbles de données cuivre à paires torsadées, les critères de choix n’engagent plus uniquement les performances en débit, souligne Olivier Parizot. Par exemple, des câbles spécifiques s’installent aussi en ambiance extérieure. La technologie PoE, Power over Ethernet, permet l’installation d’équipements actifs nécessitant une alimentation électrique de faible puissance tels qu’une caméra. Pour cela, il est recommandé d’utiliser des paires torsadées dont le diamètre est légèrement supérieur à celui des brins habituellement utilisés. »

 

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Se poser la question de la fibre optique
« Par rapport au câble cuivre, la fibre optique ne permet pas la télé-alimentation de type PoE telle que disponible sur les paires torsadées, explique Olivier Parizot. En revanche, le bilan énergétique reste favorable à la fibre. À titre d’exemple, un port 10 Gbits Ethernet induit une consommation énergétique de 10 W, tandis que le même service rendu par une fibre optique ne consomme que 3 ou 4 W. À l’échelle d’un centre informatique, cela est loin d’être négligeable !
À l’heure du choix d’un support, il convient de se poser plusieurs questions pour valider ou non l’intérêt de la fibre optique dans le tertiaire : la longueur du lien, le niveau de perturbation électromagnétique et le besoin de télé-alimentation des équipements.
Dans le secteur résidentiel, lorsque le cuivre ne pourra satisfaire qu’un débit de 25 Mbits, limité par les technologies ADSL, la fibre optique permet d’atteindre 100 Mbits. Là se trouve le véritable défi de la technologie optique. CAE dispose aujourd’hui d’une offre comprenant connecteurs, fibres optiques, jarretières et solutions de traversée. Il existe aussi des câbles à fibres optiques normalisés G657A autorisant des rayons de courbures adaptés aux contraintes d’installation dans le résidentiel. »
Pour sa part, Polycâble s’intéresse sérieusement à la fibre optique dans la perspective d’une offre système hors connectique, notamment pour des applications résidentiel / petit tertiaire. Cette offre système pourrait être à l’image du concept actuel MultiVX permettant d’associer sous une même gaine plusieurs conducteurs.
Chez Prysmian, la fibre optique pour applications en résidentiel / tertiaire fait l’objet de développements notamment depuis 5 ans. « Nous couvrons l’ensemble des besoins en partant de la prise terminale optique et en passant par le boîtier d’étage, le boîtier de mutualisation de pied d’immeuble, les câbles verticaux et les câbles de branchement, détaille Hervé Heude, responsable service clients telecom chez Prysmian. Nous disposons notamment de cette fibre verre G657A développée pour les applications FTTH avec des rayons de courbure très faibles. »

 

OMERIN

 

Fibre optique : jusqu’au poste de travail ?
Dans le secteur tertiaire, l’offre de câblage fibre optique permet aujourd’hui d’aller jusqu’au poste de travail. « Mais cela reste exceptionnel, tempère Jean-Luc Hennes chez Nexans. Dans 9 cas sur 10, la fibre optique reste au niveau des rocades et des liaisons inter-bâtiments. À partir des baies de brassage, se sont surtout des câblages cuivre qui desservent les différents postes.
Dans le résidentiel, la fibre optique arrive aujourd’hui jusqu’au DTI dans le coffret de communication. Il est d’ailleurs techniquement possible d’aller jusqu’à la télévision, mais cela reste onéreux. À ce niveau, les clés du marché sont détenues par les fabricants de TV et d’ordinateurs qui, eux seuls décideront le moment venu de proposer des interfaces optiques/électriques abordables... »

 

L’avenir du câblage cuivre
« Nous sommes aujourd’hui confiants quant à la technologie des câbles à paires torsadées, lance Jean-Luc Hennes. Nos centres de recherche et développement et nos centres de compétence, qui œuvrent sur les réseaux LAN, démontrent les larges capacités du cuivre en matière de transmission de données. Le câblage cuivre est encore loin d’être abandonné !
À terme, de tels équipements pourront même converger vers une bande passante de 40 GHz grâce aux futures technologies de codage et de prises terminales. Pour l’heure, nos développements permettent d’atteindre une plage de 1 200 à 2 000 MHz. Il faut retenir qu’un câblage de données est, de fait, toujours en avance sur les normes et sur les besoins des clients. »

Michel Laurent

 

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