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 Dossier - Juin-Juillet 2012

Internet Protocol :
une ouverture pour l’interphonie et le contrôle d’accès


Pascal Le Roux Edito

"IP ou la convergence en marche"

Le contrôle d’accès sur IP ou « Internet Protocol » prend aujourd’hui de l’ampleur. Sur un marché annuel de 125 M€, il concerne 10 % des installations. Et ce n’est pas là un exemple isolé, car l’Internet Protocol devient la colonne vertébrale d’un mouvement de convergence par lequel contrôle d’accès, vidéosurveillance et systèmes anti-intrusion fusionnent vers des solutions intégrées. Le point de convergence demeure cependant la fonction de contrôle d’accès.
Véritable standard de communication, l’IP n’est pas nouveau soit, mais il s’agit pour notre métier d’un protocole commun aujourd’hui émergent et reconnu par une famille d’industriels de plus en plus large.
L’ouverture du protocole donne la possibilité de marier différents composants issus de multiples fabricants. La conception de produits directement sous IP facilite la réalisation d’une installation adaptée aux besoins précis du client.
À l’heure où le Minitel tire sa révérence après 40 ans de service, rappelons que ce terminal a longtemps permis d’établir des connexions avec les centrales de contrôle d’accès à distance. Si Internet a pris depuis la main sur les liaisons distantes, l’intégration native de l’IP dans les systèmes permet une connexion avec un accès direct depuis n’importe quel ordinateur ou même smartphone autorisé. En d’autres termes, l’IP symbolise le décloisonnement et l’entrée dans l’ère d’une gestion multisites totalement transparente.
Le contrôle d’accès et ses avantages liés à l’IP forment aussi une des briques contribuant à la performance énergétique du logement ou du bâtiment. C’est aussi une des clés d’entrée dans le monde de la domotique parmi les plus légitimes. Quel système, mieux que le contrôle d’accès, peut gérer les flux des personnes au sein d’un bâtiment et délivrer à d’autres équipements les informations relatives à l’activité réelle ?
L’approche du numérique par l’Internet Protocol se pose actuellement comme un élément fédérateur et dynamisant au sein d’IGNES. Un groupe de travail dédié à l’interopérabilité se consacre notamment à l’IP dans sa dimension tertiaire. Cette technologie ouvre clairement la voie à de nouveaux marchés. À l’horizon 2015, les prévisions permettent d’estimer la pénétration de l’IP à hauteur de 20 % du marché du contrôle d’accès et de 50 % du marché de la vidéosurveillance. Le secteur de l’anti-intrusion, dans son mouvement de convergence vers le contrôle d’accès pourrait à cette échéance intégrer 5 à 10 % d’équipement sur IP.

Pascal Le Roux,
Vice-président d’IGNES


Internet Protocol :
une ouverture pour l’interphonie et le contrôle d’accès


Depuis quelques années, l’IP prend place au cœur des solutions d’interphonie et de contrôle d’accès. De quoi offrir de nouvelles fonctionnalités aux utilisateurs et envisager plus simplement le rapprochement multisites, la gestion à distance ou la connexion à d’autres équipements.

 

Conçu sur une base IP, le système IS d’Aiphone permet de mixer poste maître et module de gestion sur PCSigne des temps, l’Internet Protocol est partout ou presque. Il est aujourd’hui évident de le voir s’installer dans les applications du bâtiment, sur des équipements autres que bureautiques.
Dans le tertiaire, le mouvement s’engage doucement avec l’arrivée d’équipements tels que des climatiseurs directement connectables sous IP. Le contrôle d’accès et l’interphonie contribuent aussi à souligner cette tendance. Dans l’habitat, le mouvement est encore timide, bien que quelques challengers de la domotique se lancent sur ce créneau pas encore véritablement exploité par les majors.
« Depuis près de 3 ans, il n’y a plus vraiment de limites entre l’interphonie pour habitat haut de gamme et les équipements pour petit et moyen tertiaire, souligne Antoine Pelloux, responsable marketing chez Aiphone. Les solutions résidentielles ont beaucoup évolué, de façon étroite avec la technologie IP, issue des applications tertiaires. »

 


 

 

Un marché tertiaire bien établi
L’approche de l’Internet Protocol peut être relativement simple avec des solutions « prêt à poser »Chez Stentofon Zenitel, l’interphonie sur IP couvre le secteur tertiaire au sens large, avec certains marchés phares tels que le milieu hospitalier. Sur les dernières réalisations du programme « Hôpital 2007 », Zenitel a en particulier été retenu pour des solutions entièrement sur IP. Christophe Leroy, directeur de Stentofon Zenitel : « l’IP rencontre beaucoup de succès dans le secteur des infrastructures telles que les autoroutes, aéroports, transport ferroviaire, gares… Nous sommes également bien présents sur le marché des infrastructures pénitentiaires. » Dans ce domaine, rappelons que toutes les cellules sont équipées d’un interphone. Au total, un établissement compte près de 900 à 1 000 interphones en interfaçage avec le contrôle d’accès. Si les terminaux ne sont pas sur IP, les serveurs en revanche communiquent entre eux sur IP. « En général, dans les constructions neuves, nous privilégions des installations totalement sur Protocole Internet. En rénovation, cela dépend des installations en place. »
Au-delà de l’interphonie et de la vidéophonie, Aiphone a mis à profit les atouts de l’Internet Protocol pour déployer une solution de convergence. Dédiée au secteur tertiaire au sens large, l’offre IS permet ici d’abolir les distances entre sites et marie l’analogique avec le numérique. De multiples configurations permettent au système IS de se placer au centre d’une large problématique de contrôle d’accès. Objectif : gérer de façon centralisée la sécurité sur IP. D’une manière plus générale, le système IS constitue une solution flexible pour toutes les applications avec la possibilité de la mutualiser avec d’autres systèmes à l’aide de passerelles : sonorisation, CCTV, contrôle d’accès... Il s’agit là d’une solution évolutive pouvant passer d’une configuration analogique à une configuration numérique sur IP ou hybride. Basé sur l’IP, le système IS peut à lui seul assurer des échanges sur de longues distances, tout en utilisant un câblage de réseau existant. D’où une approche économique intéressante. Initialement spécialisé dans l’interphonie professionnelle, Castel a étendu son offre au contrôle d’accès : « C’était une volonté de l’entreprise à laquelle l’IP a largement contribué », explique Paul Santos, en charge de la communication.
Chez CDVI, toutes les centrales sont conçues sur IP depuis 4 ans. « En 2013, nous devrions lancer un lecteur de badges sur IP en lien avec une serrure électronique. Le tout alimenté via le concept Power over Ethernet », précise Pascal Le Roux, directeur général de CDVI.

 


 

 

Convergence et homogénéité
Cette solution de contrôle d’accès pour 1 ou 2 portes permet de gérer jusqu’à 5 000 badgesDes équipements reliés entre eux sur IP ne sont pas forcément accessibles par Internet. Certains offreurs, tels que CDVI, conseillent de dissocier le réseau de contrôle d’accès du réseau d’informatique de gestion de l’entreprise. Le réseau de contrôle d’accès peut utiliser pour sa part le protocole de transfert hypertexte sécurisé (htpps) garantissant théoriquement la confidentialité et l’intégrité des données envoyées par l’utilisateur.
Sur un autre registre, le standard IP offre dans certaines mesures la possibilité de marier entre eux des produits d’offreurs différents. Ainsi, dans le domaine du contrôle d’accès, tel lecteur de badges pourra communiquer avec une centrale d’une autre marque… En revanche, la connexion d’équipements sous IP fait appel à un câblage en étoile pour lequel chaque composant connecté dispose de sa propre liaison (à moins d’utiliser des switchs). Le câblage est donc différent de celui d’un bus KNX ou Lon, qui permet de relier moult points sur le parcours d’un média unique. Avec sa solution Atrium native IP, CDVI propose cependant de mixer l’IP avec un bus série (RS485) permettant de chaîner entre eux de multiples lecteurs de badges.    
Les fournisseurs d’équipements sur IP utilisent aussi le protocole SIP (Session Initiation Protocol). Couche IP standardisée, ce protocole ouvert de télécommunications multimédia (son, message, vidéo…) est actuellement le plus utilisé pour la téléphonie par Internet ou voix sur IP (VoIP). Le protocole SIP est également destiné à de nombreuses applications telles que la messagerie instantanée, la visiophonie, la réalité virtuelle ou même les jeux vidéo. Il a été conçu pour établir, modifier et terminer des sessions multimédia.
Dans ce contexte, l’interphonie sur IP risque-t-elle d’être confondue avec la téléphonique sur IP ? « Non, car aujourd’hui un IPBX [ndlr : système acheminant les communications téléphoniques sur IP] n’est pas capable de gérer l’ensemble des fonctions avancées de l’interphonie, explique Christophe Leroy, directeur de Zenitel. L’interphonie peut faire l’objet de produits de sécurité, capable de remonter des alarmes, passer directement en mains-libres et délivrant une qualité audio supérieure à celle de la téléphonie. »
Grâce à l’IP, Castel joue la carte de l’interropérabilité avec des systèmes tiers : vidéosurveillance, supervision ou encore téléphonie sur IP. L’intelligence du système se trouve dans la platine de rue ou dans le poste de réception maître. Il n’y a pas forcément besoin d’un serveur dédié. « Nous proposons également des platines de rue à connecter directement sur une centrale IPBX de téléphonie sur IP. La platine de rue est alors vue comme un simple poste sur IP. A ce stade, l’installation demeure très simple à mettre en œuvre », explique Paul Santos.

 


L’avis du distributeur…

Jérôme Chaffard, directeur général d’ADI (1) : « En 4 ans à peine, nous avons pris le virage de l’Internet Protocol dans le domaine de la sécurité. L’IP concerne aujourd’hui environ 40 % de notre chiffre d’affaires ! Il ne s’agit d’ailleurs que de croissance pour l’entreprise. Avec une mutation au plus estimée à 15 % des ventes, nous n’observons qu’une très faible baisse d’intérêt pour les systèmes traditionnels. Si nos clients historiques font le choix de l’IP, cette technologie draine aussi une nouvelle clientèle. Les installateurs ont compris que l’IP rendait de nouveaux services : gestion multi sites, connectivité, gestion à distance… »
Et Jean-Marie De Troy, chef de produit vidéosurveillance, d’ajouter : « L’offre IP préfigure l’avenir des installations de sécurité au sens large dans le bâtiment. Ainsi, en poussant plus loin la notion de décentralisation, le poste de contrôle pourra être déplacé, voire mobile. »
Pour Vincent Bouché, chef de produit contrôle d’accès, l’Internet Protocol gagne aussi les systèmes de taille modeste nécessitant la gestion de quelques portes. « Nous voyons d’ailleurs arriver sur le marché des systèmes vraiment très simples à installer ! »
Depuis 4 ans, ADI accompagne les installateurs avec l’aide de ses partenaires et leur propose des formations spécifiques. ADI dispose d’une école de formation.
(1) ADI, distributeur généraliste de produits de sécurité électronique, dispose de 12 agences en France.


 

Intérêts de l’Internet Protocol
Le paramétrage des produits s’effectue généralement via une page web accessible à distanceLe premier atout d’une solution sur IP n’est autre que l’utilisation du câblage structuré (paires torsadées) présent dans le bâtiment. En effet, une fois relié à la baie de brassage ou au tableau de communication, l’interphone ou les lecteurs de badges se voient attribuer une adresse IP et ne nécessitent pas de tirage de câbles additionnels. La communication est ainsi traitée comme un autre média, localement ou à distance. Un peu comme on pourrait installer une imprimante sur un réseau.
De fait, l’IP gomme toute notion de distance, car une fois rentrés sur le réseau, l’interphonie ou le contrôle d’accès peuvent être gérés sous un angle multisites.
« En matière d’interphonie, le troisième atout consiste à recourir à un large choix de postes intérieurs, souligne Antoine Pelloux chez Aiphone. Il est possible d’utiliser un poste maître ou bien des PC équipés de logiciels sous licence. On peut aussi bénéficier d’une communication interne entre postes de travail. »
L’IP permet également de s’affranchir, lorsque cela est possible, de l’alimentation électrique de la platine de rue. Il n’y a donc qu’un seul câble à tirer. En effet, grâce au standard PoE (Power over Ethernet), les quelques watts nécessaires au fonctionnement de la platine peuvent être acheminés par une paire torsadée dédiée. L’alimentation en charge d’injecter le courant se trouve au niveau de la baie de brassage. « En matière d’interphonie, la platine de rue peut comporter une part importante d’électronique. Elle est conçue pour résister aux variations de température, d’humidité et aux chocs », ajoute Antoine Pelloux, en insistant sur le niveau de qualité des produits.
Enfin, notamment au bénéfice des applications multisites, il est facile d’intervenir à distance pour effectuer une opération de maintenance ou simplement pour mettre à jour les autorisations d’accès.

 


 

 

Nouveaux interlocuteurs
Atrium permet de mixer des liaisons IP avec des liaisons série. De fait, le réseau permet de chaîner plusieurs lecteurs de badges, ce qui induit une réduction des câblages.En matière de relations avec le client, l’électricien avait jusqu’alors affaire au responsable technique pour l’interphonie ou le contrôle d’accès analogique ou numérique sur bus spécifique. Avec l’IP¨, il est amené à rencontrer un interlocuteur qu’il connaît assez peu : le responsable informatique. L’IP est son domaine et toute installation transitant par les réseaux informatiques le concerne directement.
« L’administrateur de réseaux doit vérifier de son coté la question des débits de données et éventuellement de l’alimentation PoE sur paire torsadée », ajoute Pascal Le Roux chez CDVI.


Paramétrage et mise en service
Le paramétrage et la mise en service sont certainement les étapes les plus délicates de l’installation. Il ne faut pas s’en cacher. Pour ses équipements sur site étendus, tel le système Alphacom, Zenitel se charge systématiquement de la mise en service. « Il s’agit surtout de maîtriser un nombre important de fonctions spécifiques à des domaines d’applications donnés ». Cependant, les systèmes d’interphonie ou de contrôle d’accès les plus simples, mettant en œuvre des fonctionnalités basiques, sont largement à la portée des installateurs. C’est le cas avec Pulse, une solution d’interphonie sur IP sans serveur central. Là, Zenitel garantit la configuration du système, via un navigateur web, en moins de 10 min. « Seul un guide de 2 pages suffit à l’installateur pour déployer la solution. »

 

tableau fabricant

 


 

 

Comment aborder cette technologie ?
D’une façon générale, une formation de 1, 2 ou 3 jours permet à l’installateur de comprendre les rudiments de l’interphonie ou du contrôle d’accès sur IP. Mais avant cela, il est utile de maîtriser les principes de base des réseaux informatiques. Il est vrai que l’installateur sera de plus en plus souvent amené à mettre en œuvre des produits actifs et à côtoyer le monde des courants faibles. L’interphonie et le contrôle d’accès sur IP sont 2 raisons supplémentaires qui pourront inciter à faire le pas.
Dans le cadre des constructions tertiaires neuves, le « tout IP » s’impose et la plupart des bureaux d’études poussent à un tel déploiement. Et chez les fabricants ? « Depuis 2002, l’ensemble de nos investissements en R&D concerne l’IP, souligne-t-on chez Zenitel. Si l’IP reste aujourd’hui encore à un niveau de prix légèrement supérieur aux solutions traditionnelles, le basculement pourrait avoir lieu d’ici 3 à 5 ans. »
Aiphone réalise pour sa part 2 à 3 sessions de formations par mois à destination des distributeurs et des installateurs. « Sur la base d’une connaissance de l’IP et des réseaux, nous dispensons en une journée une approche des grandes lignes. En 3 jours, nous pouvons assurer une formation de 3e niveau, assure Antoine Pelloux. Le marché de l’IP s’ouvre actuellement aux distributeurs et aux électriciens. Il y a là pour eux une véritable valeur ajoutée. »
L’installation du système d’interphonie Xellip de Castel ne nécessite généralement pas de formation. « Nous proposons cependant des formations de 1 à 4 jours pour la solution VDIP et ses nombreuses fonctionnalités. Castel assure également sur demande, la mise en service et le paramétrage des installations », ajoute Paul Santos.

Michel Laurent

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