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 Solution technique - Novembre-Décembre 2013

La mesure des champs électriques


Si une antenne-relais génère un champ électrique dont il faut contrôler le niveau d’intensité compte tenu des risques pour la santé humaine, il n’en va pas de même des équipements électroniques : ils engendrent des champs électriques qu’il convient de mesurer afin de maîtriser l’émissivité et l’immunité des appareils.

EM64 - Exigences applicables aux luminaires  et ballasts pour lampes à décharge L’intensité du champ électrique se mesure en volts par mètre (V/m), en millivolts par mètre (mV/m) ou en microvolts par mètre (µV/m). Comme la variation du champ électrique peut être très importante, on utilise aussi le décibel par rapport au microvolt par mètre (dBµV/m). Le niveau de référence de 0 dBµV/mètre correspond à 1 µV/mètre, et la formule utilisée pour la conversion est : EdBµV/m = 20*log(EµV/m)

Mesure indispensable des champs électriques hertziens
Quel est l’effet des champs électriques émis par les antennes-relais sur la santé ? Les recherches pour connaître ce que les animaux pouvaient supporter sont la base des normes prises en compte par les organismes de contrôle accrédités Cofrac et discutées par les associations de défense des consommateurs comme Robin des toits et son partenaire Mesures-CQFD, le Criirem, le Priartem, France nature environnement, l’Afutt…
Retour en 1999 : le Parlement européen émet un projet de résolution qui est soumis à la Commission européenne (rapport Tamino, A4-0101-99). Il y est fait état de deux sortes d’effets :

  • les effets aigus apparaissant à des expositions de faible durée à des niveaux de champs élevés. Les propositions de l’ICNIRP conduisant au décret n° 2002-775 du 3 mai 2002 fixant les valeurs de champ à ne pas dépasser sont reprises : 41 V/m pour une antenne GSM à 900 MHz, 58 pour une antenne GSM à 1 800 MHz, 61 pour une antenne UMTS, le Wi-Fi…
  • Les effets biologiques apparaissant à des expositions de longue durée à des niveaux faibles de champ. Une norme de 1 V/m (fréquences radioélectriques et téléphonie mobile confondues) est proposée, correspondant à 0,6 V/m pour la seule téléphonie mobile, toutes fréquences confondues.

Catherine Gouhier, secrétaire générale du Criirem, souligne que « sur proposition de la Commission, le Conseil des ministres européens a adopté la recommandation 1999/519/CE du 12 juillet 1999 […] ne retenant que les effets des expositions de faible durée à des niveaux de champs élevés. Il ignore totalement le principe de précaution. »
Force est de constater qu’aujourd’hui, le débat a pris un caractère politique : d’un côté, se trouvent les bureaux de contrôle et les laboratoires privés accrédités par le Cofrac, qui mettent en œuvre le protocole ANFR/DR 15 de l’Agence nationale des fréquences (mesure sur site du niveau d’exposition du public aux champs électromagnétiques émis par les stations émettrices fixes). Grâce à ce protocole réglementaire, les organismes accrédités vérifient le respect des valeurs limites d’exposition du public prévues par le décret du 3 mai 2002.
De l’autre, les associations de défense des consommateurs (non accréditées par le Cofrac) militent en faveur d’une exposition ne dépassant pas 0,6 V/m. Notons que dans sa résolution 1815 (27 mai 2011), conformément au principe de précaution, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a préconisé un seuil de prévention ne dépassant pas 0,6 V/m pour les niveaux d’exposition à long terme aux micro-ondes en intérieur, à ramener à moyen terme à 0,2 V/m.
De son côté, le Copic (organisme issu de la Conférence nationale ouverte en juillet 2009 sur les effets possibles des rayonnements électromagnétiques sur la santé) retient que :

  1. les niveaux de rayonnement électromagnétiques constatés sur le terrain sont très inférieurs au niveau réglementaire de 41 V/m préconisé en France ;
  2. un abaissement excessif de ce niveau (par exemple à moins de 3 V/m) aurait des effets négatifs sur la qualité du service et l’accessibilité au réseau, obligeant à une multiplication du nombre des émetteurs ;
  3. l’intensité croissante de la compétition entre opérateurs et l’augmentation forte et régulière de la demande en capacité de débit conduisent inévitablement à une densification des réseaux.

Il a par ailleurs été démontré que, pour réduire l’exposition des personnes, il suffirait de multiplier par trois le parc d’antennes-relais. Techniquement, cela ne poserait aucun problème, mais comment la société l’accepterait-elle ? Le buzz qui règne autour des antennes montre un public est très réticent à la pose de nouvelles antennes, tandis que les opérateurs ont des difficultés à trouver des sites.

Trois appareils de mesure des champs hertziens
Selon le Dr de Sèze, chercheur à l’unité de Toxicologie expérimentale de la direction des risques chroniques de l’Ineris, « il y a trois types d’appareils de mesure des champs électriques hertziens principaux :

  • le mesureur de champ, ou champêtre, qui mesure l’ensemble des champs à proximité et n’a pas une sensibilité très importante. Il y a dix ans, le seuil de sensibilité était de 0,5 ou 0,6 V/m à peine, contre de 0,2 à 0,3 V/m actuellement. Il coûte entre 5 000 et 8 000 euros ;
  • l’analyseur de spectre est un appareil de mesure qui possède une très grande sensibilité (jusqu’à 1 mV/m), capable d’indiquer très précisément la gamme de fréquences dans laquelle se situe l’exposition. Il est plus complexe que le champmètre, demande à régler de nombreux paramètres et s’adresse aux techniciens ayant une expérience dans l’interprétation des résultats de la mesure. Il coûte entre 20 000 et 30 000 euros ;
  • le dosimètre sélectif en fréquence donne des valeurs de champ en fonction des fréquences présélectionnées. Petit appareil portable, simple à utiliser pour enregistrer les mesures, il requiert un équipement pour l’analyse et la visualisation. Son prix : environ 4 500 euros. Il est donc moins cher, mais aussi moins précis que le champmètre. Son intérêt ? Fournir le temps durant lequel on a été exposé à une plage de fréquences ».

Le traitement des données est facilité par la cartographie des ondes en 3D : une innovation expérimentée par le Criirem dans la ville d’Échirolles.

La mesure des faibles champs électriques d’équipements
Un multimètre émet un champ électrique dont l’intensité s’évalue en dBµV/m. Pour le commercialiser, le fabricant doit y apposer le logo CE indiquant que l’appareil est conforme à la directive européenne 2004/108/CE relative à la compatibilité électromagnétique. Celle-ci impose la mesure du champ émis par l’équipement électrique. Il convient en effet de s’assurer qu’il n’émet pas trop de perturbations. La valeur limite en milieu résidentiel est de 30 dBµV/m dans la gamme de fréquence de 30 à 230 MHz pour une mesure à une distance de 10 mètres, et de 37 dBµV/m entre 230 et 1 000 MHz.
Un niveau d’amplitude de l’ordre du dBµV se mesure grâce à une antenne caractérisée par une bande relativement large et à un récepteur de mesure similaire à un analyseur de spectre. Pour mesurer des fréquences relativement élevées (entre 200 MHz et 1 GHz), on utilise une antenne multibrins, et une antenne biconique entre 30 MHz et 200 MHz. Par le facteur d’antenne, on connaît la relation entre le champ mesuré en volt par mètre et sa valeur convertie en dBµV/m.

 

Jean-Claude Festinger

 

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