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 Dossier - Janvier-Février 2011

 Performance énergétique : la filière électrique au cœur des watts


Jose PereiraEdito

"Les électriciens, acteurs majeurs de l’efficacité énergétique"

Aujourd’hui les problèmes environnementaux sont au cœur des préoccupations économiques. Tous les secteurs sont concernés et les défis sont nombreux : énergies fossiles (pétrole, charbon, etc.), changements climatiques, augmentation de la facture énergétique. Le bâtiment étant le premier consommateur d’énergie en France et le deuxième émetteur de CO2 derrière les transports, il devient impératif de trouver de nouvelles solutions énergétiques.
Portée par le Grenelle de l’environnement, la France essaie de relever ces défis et ceux prioritaires pour le secteur du bâtiment, d’une part, en construisant des bâtiments neufs de plus en plus économes en énergie, voire producteur d’énergie d’ici peu, et en, d’autre part, rénovant le parc existant (31 millions de logements).
Voilà pourquoi la CAPEB a mis en place le dispositif ECO-artisan. Cette démarche a pour objectif de renforcer le positionnement des artisans du bâtiment comme acteurs incontournables de cette évolution majeure du bâtiment, et de préserver leur indépendance.
Dans ce contexte relatif aux économies d’énergie et à l’efficacité énergétique, il revient légitimement à notre profession, avec les fabricants et les distributeurs en matériel électrique à nos côtés, de proposer des solutions conformes aux nouvelles exigences réglementaires, adaptées aux attentes de notre clientèle et compatibles avec les objectifs du Grenelle de l’environnement.
Je pense tout particulièrement à l’éclairage, à la ventilation, aux solutions visant à l’efficacité énergétique, aux énergies renouvelables comme la pompe à chaleur et le photovoltaïque. Pour ce dernier, nous comptons sur les pouvoirs publics afin que soit fixé un cadre réglementaire stable, propice à fournir aux acteurs présents sur ce marché une certaine visibilité, ce qui n’est pas le cas actuellement.
La domotique, quant à elle, peut, au-delà des bénéfices indéniables en termes de confort, apporter une véritable valeur ajoutée grâce aux systèmes performants de gestion des systèmes de chauffage (programmation et régulation).
Cette double dimension de proximité et d’innovation sera d’ailleurs au cœur de nos Journées de la Construction qui se tiendront les 6, 7 et 8 avril 2011 au Centre des Congrès de Lyon.


José Pereira,
président de l’UNA Équipement Électrique et Électronique - CAPEB

 


Performance énergétique : la filière électrique au cœur des watts


Les équipements électriques sont au cœur de la performance énergétique au moins pour trois raisons : grâce à l’éco-conception ils consomment de moins en moins d’énergie, ils constituent le lien parfait entre capteurs et actionneurs, enfin ils donnent toute la mesure à la gestion intelligente du bâtiment.

 

SiemensDepuis peu, les fabricants de la filière électrique se préoccupent de la consommation intrinsèque de leurs produits. Cette démarche est surtout récente pour les petits équipements consommant peu de watts tels que les contacteurs, disjoncteurs, blocs d’éclairage de sécurité. La notion d’éco-conception a désormais fait sa place dans les bureaux d’études des fabricants et aussi dans les discours des marketeurs. Le vent souffle donc (enfin) dans le sens de la performance énergétique des produits qui constitue une partie de la démarche d’éco-conception.

 

Des produits moins énergivores
Chez Schneider Electric, via sa filiale France Transfo, les transformateurs secs à faibles pertes intègrent des bobinages spécifiques et des tôles de qualité supérieure. Certes, le coût d’acquisition reste supérieur de 20 % à celui d’un produit standard... Mais coté bilan, le ROI d’un transformateur de 1 600 kVA chargé à 30 % se limite à 3 ans, tout en évitant 1 tonne de CO2/an. « Malgré cela, le message reste difficile à faire passer auprès des décideurs, souligne Paul Krak, responsable marketing clientèle chez Schneider Electric. Nous avons de ce fait une lourde mission d’information de la filière auprès des prescripteurs et des installateurs. »
Autre exemple de réduction de la consommation électrique intrinsèque, avec un nouveau disjoncteur modulaire de petite puissance pour le tertiaire et l’industrie que Schneider Electric mettra prochainement sur le marché : une réduction de 20 % des pertes thermiques au niveau des pôles. La qualité du contact limite l’échauffement et fait chuter la perte, par exemple de 2,9 à 2,3 W par pôle pour un modèle 20 A. C’est peu, mais à l’échelle du nombre de pôles vendus par an, le gain est élevé. « Dans certaines situations, les progrès thermiques réalisés contribuent aussi à éviter le déclassement en température du tableau », ajoute Paul Krak.


Même tendance chez Hager : « Depuis le début 2010, tous nos produits sont systématiquement eco-conçus, explique Séverine Lienhart, chef de produit gestion de l’énergie. Nous nous imposons d’ailleurs une réduction minimale de 10 % de leur consommation intrinsèque par rapport à la génération précédente. Bien souvent, l’économie atteint même 20 à 30 % ». Par exemple, Hager propose aujourd’hui une génération de contacteurs dotés de bobines basse consommation (3,5 W au lieu de 5 W en maintien). De même pour les variateurs d’éclairage modulaires : les progrès en matière d’électronique de puissance permettent de faire chuter la consommation de 5 W à un peu moins de 1 W. « Nous commençons aujourd’hui à communiquer vers l’installateur à propos de la consommation des produits. Cette information est annotée sur les emballages ou sur les notices. »


En 2007, Cooper Safety lançait les blocs d’éclairage de sécurité Planète 60 et Planète 400 à très faible consommation, c’est-à-dire inférieure à 1 W. « Aujourd’hui, nous nous apprêtons à lancer les blocs de grande puissance dans la famille Planète, commente Claude Boyer, directeur marketing et services. Ces modèles consommeront environ 0,5 W, sans oublier l’impact sur l’environnement lié à la réduction de la taille de la batterie par exemple. En 2011, hormis pour maintenir une offre “entrée de gamme” qui à terme disparaîtra, nous passerons aux leds sur toutes les familles de blocs. »
Cooper Safety élargit actuellement le concept Planète à son offre d’alarmes incendie avec de nouveaux modèles type 2, 3 et 4 dont la puissance consommée est à présent divisée par 5.


ThebenChez Theben, la phase de conception des produits prend en compte les consommations en mode passif. Par exemple, le variateur universel d’éclairage Dimax consomme aujourd’hui 0,2 W en veille (contre 1 W auparavant). « Avec le fait de multiplier les capteurs de présence et de mouvement dans les bâtiments, nous sommes très attentifs à leur consommation énergétique, ajoute Thierry Leroy, directeur marketing de Theben France. Aujourd’hui, nos capteurs consomment de 0,6 à 0,8 W. La gamme à venir prochainement sera, de ce point de vue, encore plus performante. »


Siemens est également très attentif à la consommation des composants électriques : « Nos appareils d’ambiance tels que les sondes sous protocole EnOcean n’embarquent plus de piles mais disposent d’un petit capteur photovoltaïque », souligne Michel Rakotoanosy, directeur marketing et technique de l’activité CPS chez Siemens.

 

Un eco-étiquette pour plus de visibilité
LegrandDans le cadre de la performance énergétique des bâtiments, Legrand n’a pas hésité à créer une éco-étiquette appliquée à chaque solution permettant de réduire la consommation électrique. Cette étiquette, dont les données sont calculées par un cabinet indépendant, affiche clairement l’économie annuelle en euros (et sous quelles conditions), la durée d’amortissement, ainsi que l’économie en kg équivalent CO2. De plus, Legrand instaure 2 niveaux de performance Eco1 / Eco2 au sein même de l’offre. « Aujourd’hui, tous nos nouveaux lancements majeurs comportent une dimension d’éco-conception dans laquelle nous associons les PEP, profils environnementaux produits », ajoute Olivier Le Berre, directeur marketing communication Legrand France.


Résidentiel et tertiaire : 2 approches différentes
Dans le secteur résidentiel, il est souvent difficile d’évoquer un « retour sur investissement » tel que perçu par les acteurs du monde tertiaire ou industriel. Il est donc préférable de prendre en compte la réduction de consommation générée par l’investissement. « C’est une façon de rapporter le coût d’investissement au kWh évité afin de pouvoir comparer des solutions entre elles, confirme Olivier Le Berre. Dans le résidentiel, prime la volonté du client de faire baisser sa consommation et indirectement de gagner en confort. Ensuite, intervient un angle plutôt sociétal, lié au fait de réaliser des économies d’énergie pour contribuer à grande échelle à la protection de l’environnement. »

 

Quelques produits « passifs »
Par produit « passif », il est question de produits non électriques, mais contribuant à la performance de l’installation. Exemple peut-être le plus répandu : le boîtier d’encastrement étanche aux déplacements d’air. Sur sa gamme étanche, Schneider Electric enregistre la plus forte hausse des ventes de boîtiers.


Cooper CapriChez Cooper Capri, l’arrivée début 2011 de la gamme Planète Box 360 permet de proposer une boîte d’encastrement bi-matière étanche et dotée d’une solution anti-condensation. Autre atout : cette boîte intègre un anneau tournant permettant de retrouver l’horizontalité des fixations de l’appareillage. D’où un gain de temps.
Au catalogue Legrand, l’offre de boîtiers étanches et d’obturateurs de conduits se nomme Batibox Energy.

 


Consultez les PEP
Les Profils Environnementaux Produits déterminés par les fabricants, sont disponibles en ligne sur leur site web respectifs :
- Hager : www.hager.fr ;
- Legrand : www.legrand.fr ;
- Schneider Electric : www.schneider-electric.fr ;
- Theben : PEP en cours de rédaction.


 

 

Faciliter l’automatisation du bâtiment
Schneider Electric« Chez Schneider Electric, nous avons fait le choix de proposer une offre interopérable avec les 3 grands standards de protocoles du bâtiment : Bacnet, KNX et Lonworks. Sans oublier les passerelles nécessaires vers les réseaux tels que Dali », explique Paul Krak.
Plus largement, le programme HOMES piloté par Schneider (regroupant 13 partenaires) devrait aboutir en 2013 à une nouvelle génération de solutions intéropérables pour les secteurs du résidentiel et du tertiaire, aussi bien dans le neuf qu’en rénovation. Objectif : doter chaque bâtiment de solutions permettant d’atteindre la meilleure performance énergétique, tout en garantissant le confort des occupants.
Dans l’immédiat et pour le résidentiel, Schneider Electric devrait lancer mi-2011 la gamme Duoline Zen. Cette solution sans fil permettra de piloter le chauffage en assurant la mesure des consommations d’énergie. Une offre en droite ligne avec les attentes de la RT2012 en matière de comptage. Par ailleurs, la gamme d’appareillage d’installation Unica s’étend actuellement à des fonctions KNX, pour le résidentiel et le petit tertiaire.
Concernant la mesure des consommations, en 2010 Schneider Electric a étendu sa gamme de disjoncteurs boîtier moulé NFX compact pour proposer un modèle 100 A délivrant une mesure native de l’énergie. Cette mesure est à présent homogène, via un unique protocole sur l’ensemble des gammes boîtiers moulés.
Pour sa part, sur le marché résidentiel, Legrand met principalement en avant la programmation du chauffage sur la base de solutions « produits » existantes qui répondent parfaitement aux enjeux actuels. En complément, toujours en lien avec la performance énergétique, intervient la commande automatique de motorisation des volets.


Dans le secteur tertiaire, les capteurs de présence prennent toute leur dimension, en asservissant l’éclairage à l’occupation des locaux selon différentes configurations. « Un détecteur de mouvement avec mesure du seuil de luminosité peut s’installer avec ou sans poussoir d’allumage et d’extinction volontaire, précise Olivier Le Berre. Sans poussoir, il permettra d’économiser jusqu’à 40 % d’énergie. Avec poussoir,  l’économie atteint 55 % ! Au-delà de solutions autonomes, nous proposons aussi des systèmes intégrés à une GTB. Il faut comprendre que dans le tertiaire, l’éclairage constitue le second poste de dépense énergétique. »


Autre développement, les « prises vertes » représentent peut-être le levier de performance énergétique le plus simple que Legrand a imaginé et concrétisé pour le secteur tertiaire. Ces prises (pour lumières d’appoint, machine à café, alimentation d’ordinateur...) coupent l’alimentation selon une plage horaire définie par l’utilisateur. Il s’agit de circuits dédiés comme tels à partir du tableau de répartition ou de blocs programmables amovibles pour les installations existantes.  


HagerChez Hager, le gestionnaire d’énergie pour applications petit tertiaire et résidentiel prend dorénavant part à la gamme Kallysta et déploie ses fonctionnalités de commande du chauffage (1 à 3 zones) et de délestage. Tendance liée à l’évolution de la réglementation thermique : l’affichage des consommations. « Le gestionnaire pourra afficher une consommation globale, en lien avec le compteur électronique et 3 voies d’entrée relatives à 3 départs de circuit dans le tableau, ainsi qu’un historique sur 24 heures. Le tout avec la possibilité d’effectuer une corrélation avec un capteur de température extérieur. Rien que le fait d’afficher les consommations permet théoriquement d’économiser 10 % en jouant sur le comportement des occupants. »
Lancé en octobre 2010, ce gestionnaire devrait arriver sur le marché en version KNX en mars 2011. De quoi compléter l’offre Tebis de gestionnaires de chauffage et permettre un report des données sur une interface d’ambiance. Autre avancée du gestionnaire : la coupure d’alimentation de l’eau chaude sanitaire en période d’absence. Le tout via un réglage à effectuer à l’avance, à l’heure près. Sans oublier la possibilité de capter un signal radio issu de contacts en feuillure...
Concernant l’éclairage, Hager a lancé en 2010 de nouveaux détecteurs de présence encastrés pour applications dans les bureaux et salles de réunion. En version standard, KNX, Dali ou KNX-Dali, ces détecteurs se règlent avec l’aide d’une télécommande (la même pour régler les détecteurs de présence et de mouvement). Un outil permettant de faire des actions de « copier/coller » des réglages d’un produit à un autre.
En 2010, Siemens a mis sur le marché un régulateur Synco Living sous KNX pour application résidentielle et petit tertiaire. Ce dernier ne régule pas simplement une température d’ambiance, mais communique les réels besoins d’énergie à l’équipement (par exemple une PAC). Le régulateur radio étend les capacités de contrôle à la gestion de l’éclairage, des stores et des prises de courant commandées. En d’autres termes, il s’agit bien d’une offre domotique.


En réponse à la RT2012, Siemens dispose également d’un thermostat d’ambiance prenant en compte l’évolution de la température ambiante. Afin d’optimiser le démarrage de la mise en chauffe, l’utilisateur règle l’inertie de son logement. Courant 2011, un nouveau régulateur de chauffage Siemens donnera la possibilité de gérer l’eau chaude sanitaire via le chauffe-eau solaire.

 

Les onduleurs soignent leur rendement
On sait aujourd’hui que le coût de fonctionnement d’un onduleur représente 50 à 70 % de son coût total de possession sur la totalité du cycle de vie. Plus précisément, le coût énergétique lié aux pertes thermiques se place dans une fourchette de 7 à 14 % du coût total de possession. Un rapide calcul montre qu’un onduleur de 200 kVA chargé à 90 % avec un rendement de 0,96 génère 5 600 E/an de pertes (coût de l’électricité et du refroidissement nécessaire à l’évacuation de la charge thermique). Le fait de réduire de 2 % le rendement, augmente donc la facture de 2 800 E/an ! À ce niveau, le temps de retour correspondant à 10 % de l’investissement entre 2 solutions à 94 et à 96 % n’est que de 12 mois.


Socomec« Depuis 3 ans, nous percevons la réelle prise en compte de ces considérations par nos clients, souligne Daniel Béranger, responsable marketing chez Socomec. Afin de prouver la réalité des rendements de notre offre onduleurs, nous faisons appel aux organismes indépendants TÜV pour l’usine italienne et Véritas pour notre usine française. »  
En entrée de l’onduleur, un facteur de puissance du redresseur proche de 1, améliore quant à lui le rendement de l’installation en diminuant le dimensionnement et les pertes des infrastructures amont : section des câbles, puissance du transformateur et de l’éventuel groupe électrogène.
« Pour aller au-delà d’un rendement déjà élevé de 96 % sur nos onduleurs, il existe une fonction “Eco-mode”, de type Off-Line sur bypass, permettant d’atteindre un seuil de 98 %. Mais cette configuration ne gère pas les défauts de qualité du courant tels que les micro-coupures », ajoute Daniel Béranger.


ChlorideChez Chloride, le mode de fonctionnement « Eco » se nomme Digital Interactive Mode : « Certes, ce mode ne corrige pas les défauts liés aux harmoniques, mais permet de garantir la classe 1 en sortie d’onduleur, précise Philippe Blandin, business development manager également en charge des grands comptes datacenters. Ainsi, avec une source délivrant un courant de bonne qualité, nous pouvons garantir un rendement de 98 %. » Depuis un peu plus d’1 an, Chloride propose aussi un mode intermédiaire baptisé Voltage Independant. Ce dernier corrige quant à lui les harmoniques et assure une sortie de classe 1. « Sur un datacenter, le retour sur investissement lié à l’achat d’un onduleur Trinergy disposant du mode Voltage Independant se situe entre 2 et 4 ans grâce aux économies d’énergie réalisées. »

 

Michel Laurent

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